Chasseur de légendes 70
Journal de bord d'un chasseur de légendes
Chapitre 70
Faux-Semblants
Et oui, déjà la 70ème aventure du blog dans
un univers au frontières du surnaturel, un monde
étrange, difficilement perceptible et qui cotoie le
notre depuis que notre univers est ce qu'il est. Ne
cherchons pas à trouver des explications logiques
et rationelles à tout ce qui nous entoure, laissons
nous aller dans cette dimension qui nous effraye
autant qu'elle nous fascine. Et pour illustrer mes
propos, quoi de mieux que d'explorer le bois de
Boulogne à Paris.
Le titre de l'article est une nouvelle fois un
clin d'oeil, une référence au film éponyme du
cinéaste canadien, David Cronenberg (La Mouche,
Existenz, Crash, Spiders, A History of Violence,
Videodrome, Les Promesses de l'Ombre), un
réalisateur qui aime explorer la part d'ombre de
chacun d'entre nous pour en monter un subtil
puzzle souvent à la limite de la folie et du rationel.
L'inconnu, la peur de découvrir ce qui se cache
derrière la porte, de faire tomber les masques,
l'appréhension d'avancer dans ce long couloir
vide sans savoir ce qu'on pourrait y découvrir au
bout. C'est un peu ce que j'ai pensé en arpentant
le tunnel menant à l'hippodrôme d'Auteuil avant de
pénétrer dans le bois de Boulogne. Bizarrement, j'ai
pensé aux oeuvres de David Cronenberg à ce moment là.
Avec Laetitia, nous avons enfin pû atteindre le bois
de Boulogne, après avoir fait quelques détours,
évidemment lorsque l'on pénétre dans une forêt, c'est
un autre monde qui s'ouvre à nous, la lumière s'en
trouve modifiée, l'air n'est plus le même tout comme
les sons qui nous entourent, tout se déforme, tout
devient plus proche et plus lointain, notre perception
s'en retrouve fausée et notre orientation déroutée,
notre part d'ombre peut à présent s'ouvrir à la nature.
Les croyances ancestrales et les peurs viscérales
peuvent surgir dès à présent, notre inconscient
s'en trouve perturbé, notre subconscient se dilate
et laisse s'entrouvrir la frontière entre l'âme et
le coeur, cette chose impalpable qui fait lien avec
la nature qui nous entoure. Ce sentiment de bien
être ou d'effroi qui se fait sentir au milieu de nul
part, cette sensation inexplicable qu'on appelle
l'instinct naturel.
En explorant le jardin de Bagatelle, quelques
détails nous sont parvenus, purement décoratifs,
les aigles de pierre soutenant le banc, les visages
enfantins encadrant l'allée du potager, les pointes
des toitures des batiments caché dans la verdure, la
statue du druide, toutes ces petites choses qui font que
notre perception du monde peut se retrouver modifiée
parce que ce sont des clefs qui ont ouvert notre
inconscient, notre imaginaire et notre conscience.
Les satyres et les diables sculptés sur les vases
d'albâtre ornant la roseraie, l'orangerie ou le
potager, tels des gardiens malveillants, m'ont
fait penser à un décor fantastique, un jardin
gothique ou une tragique romance entre l'ombre
et la lumière pouvait laisser place à une étrange
traque de l'ivoire par l'ébène. Toutes ces
petites choses m'ont impressionnées dans mon
for intérieur, ne me laissant pas de marbre.
Une rose fânée à sucité ma curiosité, elle me fît
penser à un prédateur aussi romantique que cruel,
s'en prenant à une vierge attirée en pleine nuit dans
ce jardin par la curiosité et la passion qui venait
d'enflammer son coeur quelques heures auparavant.
Comment ne pas penser à la pauvre Lucy Westenra,
vampirisée par Dracula himself lors de son séjour à
Whitby ? Je revis dans mon esprit cet instant d'une
intensité incroyable dans les quelques lignes du chef
d'oeuvre de Bram Stocker.
Avant de nous faufiler dans les allées de
Bagatelle, je pensais à cette histoire de
fantôme qui hantait le bois de Boulogne,
une ombre, ue silhouette d'apparence humaine
se promène parfois le soir et la nuit du côté de
la Grande Cascade, du lac aux abords de Bagatelle
avant de se perdre au détour de quelques arbres.
On raconte que cette entité se serait perdu et
chercherait desespérement son chemin, ce pauvre
bougre n'a pas l'air d'avoir un sens de l'orientation
très prononcé et même s'il arrive qu'il se manifeste
en plein jour, ni Laetitia, ni moi n'avons senti sa présence.
En revanche, les nouvelles de Guy de Maupassant
me vinrent en tête lorsque nous longions une des allées
du bois, d'étranges trous aux dimensions régulières
attirèrent notre attention, il s'en trouvaient des
deux côtés du chemin et même s'il n'y avait rien de
surnaturel à leur présence, ils avait le don d'exciter
notre imagination. En quittant le bois de Boulogne,
à l'entrée de Neuilly sur Seine, je repensais au
protagoniste de "Promenade", l'une des nouvelles
fantastiques de Guy de Maupassant que l'on peut
retrouver dans "Le Horla & autres récits
fantastiques". Et qui à l'inverse de nous, n'était
pas ressorti du bois de son vivant.